Au Café 71

Précédent ici

Le café se trouvait à deux pas de chez Michaël. Et littéralement à deux pas, c'était le deuxième bâtiment voisin, un café lounge petit, mais sympathique, dans un hôtel assez luxueux, quatre étoiles.

Il s'assit dans un des fauteuils bas, en tissu rose à poil assez court. Juste assez pour donner un confort sans que ce soit glamour et excessif. Le décor était urban, gris béton et brun boiserie. Le tout était relaxant ete on se sentait comme un homme d'affaire a trainer là. L'internet sans fil était gratuit, le café excellent. Parfois, on pouvait acheter d'énorme part de gâteau au chocolat, mais un peu cher.

Au bout d'un moment, un homme d'un certain âge entra dans le café, regardant le plafond à gauche à droite pour admirer la décoration. Bien que dans ses yeux, on voyait bien qu'il était partagé à savoir s'il aimait ou non.



En voyant Michaël, il leva les sourcils et souria, reconnaissant l'homme au veston de cuir. Il s'approcha et tendit la main pour serrez celle de Michaël tout en s'assoyant devant lui. Son sourire était celui-ci d'un homme paisible chaleureux. Il enleva sa casquette et la garda dans sa main gauche.

-Enchanté, je m'appele Bastien De Loire, vous pouvez m'appeler Bastien tout court bien sur, pas de formalité.

Il bougea un peu dans le fauteuil jusqu'à ce qu'il trouve une position durablement confortable.

Bastien s'avança pour prendre l'esquisse avant de retourner s'adosser dans le fauteuil pour l'observer. L'appareil photo ne semblait pas l'intéresser. Le Français arbora un air pensif pendant un bon moment, lorgnant dans tous les sens l'esquisse que Michaël, le premier, ne trouvait pas de grand art.

-C'est intéressant vos dessins. Où est-ce que vous avez vu ça ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

Aux yeux de Michaël et à sa grande surprise, Bastien semblait des plus sérieux et intéressés. Le plus probable aurait été qu'ils le croit fou ou mythomane, mais l'attitude de Bastien lui démontrait qu'il croirait ce qu'il allait raconter.

"Au grand pire, il me pensera fou, et j'aurai qu'à ne pas lui donner mon adresse."

Sur la route menant à la banlieue. Il y avait un jeune homme en détresse, nu, que j'ai évité de justesse sur la chaussée. Quand j'ai retrouvé conscience et que j'ai réussi à sortir de mon véhicule, remontant le fossé, j'ai vu un homme tenant ça en laisse. Il a pointé le jeune homme, et c'en était fait. On m'a suspecté pour l'avoir heurté, mais ils se sont rendus compte qu'il n'y avait pas de sang sur mon véhicule. Puis ça, ça m'a vu, mais l'homme lui a dit de revenir, qu'ils s'en allait. Ils sont partis.

Les mots de Michael avaient été rapides, il avait parlé sans respirer ou presque. Il était un peu nerveux, se remémorant tous ces détails. Ça n'avait pas été la soirée la plus joviale de sa vie.

Bastien écouta attentivement l'histoire de Michaël, d'un air sérieux et intéressé.

-Laissez moi vous dire. Imaginez vous que ce genre de chose arrive plus souvent que vous le pensez, mais que l'esprit humain est fait pour se protéger et que pour se faire il supprime littéralement ce genre de souvenir.

C'est le cas de la plupart des gens dans ce monde, mais il en est autrement pour vous, moi et beaucoup d'autres personnes qui finissent tôt ou tard par ce réveiller à cette réalité peu reluisante. Vous êtes conscient, Un Conscient.

Ces choses qui sont arrivées, ce n'est qu'un début, mais pas le début d'une longue série d'atrocités soyez en sur. Vous découvrirez qu'en étant exposé à ses phénomènes plus souvent, vous développerai vous même des nouveaux sens dont vous êtes doté, mais que vous ne connaissiez pas.

Vous croyiez passer pour un fou en me racontant votre histoire, mais maintenant j'inverse le rôle. Je crois à votre histoire et j'espère pour votre propre bien que vous croirai à la mienne.

Bastien hocha la tête en guise de réponse à Michaël.

-Bien sur. Les Conscients, comme on nous appele, existe depuis très longtemps. Je ne connais pas très bien leur histoire moi-même, mais juste assez pour savoir que nous existions déjà sous forme d'organisation à la Renaissance, en Europe. Pour une raison que je ne connais pas, notre nombre se multiplie depuis quelques années. Je suis venu ici au Québec pour les rassembler, les aider. Je pourrais vous parler de l'organisation dans ces détails, mais là n'est pas la question.

J'aimerais que vous nous rejoignez, en échange de quoi, je vous aiderais à résoudre le mystère qui entoure ce monstre que vous avez vu. Je n'ai jamais vu de tel bête, ni même entendu parler d'homme qui pouvait donner des ordres à ce genre de créatures.

Par contre j'ai déjà vu des signes comme ceux-là et j'ai une idée de ce qui aurait pu causer un séisme localisé avec autant de précision.

Ah ouais?

Michael semble vraiment intéressé. Il est avancé au-dessus de la petite table, et bois les dires de l'homme.

Continuez, continuez je vous pris. Renaissance, conscients... le tremblement de terre...

"Il va falloir que j'en apprenne beaucoup en tout cas!"

-Déjà que vous puissiez avaler ce que je dis, c'est impressionnant. Si je continu mes histoires vous allez vite finir schyzophrène et ne plus savoir ce qui est réel et irréel.

Avant d'aller trop vite, je veux vérifier que vous êtes bien Conscients de ce qui arrive.

Bastien fouilla dans la poche de sa veste et en sorti un cube blanc fait d'une sorte de thermodurcissant plastique et réfletant la lumière. Il était de la grosseur d'une clémentine et semblait très solide. Il le posa sur la table devant Michaël.

-Observez-le, dites moi ce que vous voyez là, ce que vous sentez, entendez...

-Portez le cube à l'oreille, indiqua Bastien en mimant le geste lui-même.

Lorsque Michaël le porta à l'oreille, il entendit une voix, faible et presque inaudible, mais il l'entendait. Il s'agissait d'une voix féminine, emplit de souffrance et de peine. Elle se lamentait dans une langue que Michaël n'arrivait pas à déchiffrer. Ça ressemblait à de l'ancien anglais au niveau du ton, mais pas assez pour saisir le sens des mots. Elle pleurait et semblait implorer qu'on la sorte. La voix se fit un peu plus audible, à la limite de l'agressant, elle voulait sortir.

Michael porta le cube à son oreille, comme le lui dictait son interlocuteur. Il ouvrit les yeux, surpris. Cela ne pouvait être un enregistrement, ce serait trop invraisemblable. Trop couteux pour le convaincre. Il leva la main, sur le point de lancer l'objet au sol, avec l'idée de délivrer l'âme qu'il imaginait emprisonné dans le bloc blanc. Mais il s'en retint, au dernier moment. Le bras encore dans les airs, un air incertain au visage, il dévisagea Bastien.

Qui est là-dedans? Comment...?

*Un fanatique, une secte? Il connaît peut-être bien ce que c'est, mais il l'utilise pour quel côté? Surtout une organisation aussi vieille...*

-Qui ou qu'est-ce qu'il y a dans le cube n'est pas vraiment important. Ce qui l'est, c'est que vous pouvez l'entendre. La plupart des gens n'entendrait rien. Il est fort probable qu'un tas de gens aient vu cette créature énorme et son maître, mais ils l'ont oubliée bien avant de se décider à en parler à quelqu'un d'autre.

Bastien tendit la main pour ravoir le cube.

Par curiosité, Michael secoua très légèrement le cube à son oreille avant de le tendre vers Bastien. Il semblait intrigué, mais tentait de ne pas trop le montrer. Une pointe de soupçons en tête.

Mais les gens les voient? C'est bien ça?

Son regard allait du cube à Bastien, puis de retour au cube.

*Comment il a bien pu avoir ça lui...?*

-Oh oui, les gens les voient, mais le cerveau préfère oublier le plus vite possible. Chaque personne a un différent degré de résistance à ce genre de vision. Nous sommes un extrême, nous nous rappelons toute notre vie ou presque. Quelques un peuvent s'en rapeller des mois, ce qui est déjà rare. Dans l'autre extrémité, le temps que la créature entre dans le champs de vision de certaines personnes, celles-ci oublient instantanément et regardent ailleurs. Mais la plupart des gens oublient dans les heures qui suivent ou au pire le lendemain.

Je ne suis pas psychologue, mais je crois qu'il s'agit d'un système d'autodéfense. En quelque sorte, on peut dire que nous sommes des handicapés et que notre handicape est de n'avoir aucun système de défense psychologique face à tout ça.

D'un autre côté, être exposé à ces phénomènes amènent le cerveau, et même le corps, à développer de nouveaux sens et de nouvelles capacités.

Vous vous rappelez de la voix dans le cube ?

Évidemment qu'il s'en souvenait, il en entendait encore l'écho des lamentations dans sa mémoire. Bastien ne faisait que vérifier.

-Ce cube est fait d'un alliage de métal, de thermoplastique et de tissus organiques, je n'en connais pas les détails. Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il est présent sur deux facettes de la réalité: celle où notre corps est, et celle où notre âme est. Croyez-vous aux âmes Michaël ?... Vous devriez, parce que c'est ce que vous avez entendu.

Je vais vous avouer que tout ça me dépasse. Les monstres, les âmes, la magie... Sinon dans les romans, j'ai jamais vraiment pensé que ce puisse être réel. Ni les implications. Bien sûr, je crois à l'âme, cette parcelle d'humanité, ce quelque chose d'inexplicable qui fait que nous ne soyons pas des robots. Qui donne l'inspiration aux gens, aux musiciens. Ce qui fait d'un enfant un être si cher.

*Maxime...*

Et les âmes, si elles existent, ça veut dire qu'il y a un paradis?

L'homme pencha la tête, avide de savoir. Avide de connaître ce qui leur était réservés, et où pouvait bien être maintenant son fils décédé.

-Le paradis n'est que pure spéculation. Nous savons que des âmes vivent seules, c'est-à-dire sans être attaché à un corps. Mais on ne pourrait pas avancer qu'il s'agit là de mort.

Maintenant que vous comprenez ça, même si vous n'y croyez pas vraiment. Vous m'avez parler d'un tremblement de terre localisé. À mon avis, il s'agit d'une pièce qui est demeuré inchangé depuis si longtemps que des âmes y vivent de l'autre côté. Il a du y avoir un grand dérangement de leur côté et la liaison avec le monde physique est tel que la secousse s'y est fait ressentir. Je ne serais pas étonner qu'au même moment, d'autres tremblements de ce genre ce soit fait sentir dans la région.

Ça ne me servirais à rien d'essayer de vous convaincre par mes paroles de la réalité de tout ça. Il va faloir aller constater vous-même, dans cet appartement. Et voilà votre outil.

Bastien reposa le cube sur la table.